Ma grand-mère est à l’hôpital (ah ben ça commence bien ce billet d’humeur « feel-good »). J’appelle mon grand-père tous les soirs pour savoir comment il gère la situation et bien évidemment prendre des nouvelles de ma grand-mère.
Mes grands-parents ont beaucoup travaillé, alors ils n’ont pas eu beaucoup de temps à consacrer à leurs enfants. Aussi, quand je suis née, moi leur première petite fille, autant vous dire qu’ils ont tout fait pour se rattraper. Ils m’ont évidemment couverte de cadeaux (oui, ce déguisement de fée était nécessaire, voyons !) mais ils m’ont aussi donné ce que tout un chacun a de plus précieux : du temps.
Et j’ai passé beaucoup de temps avec eux. J’ai eu ce privilège. D’avoir du temps. Nous avons appris à nous connaître, vraiment. J’ai développé une complicité comme il est rare d’en avoir avec quelqu’un. Beaucoup de rires, de débats. Nous avons affronté un certain nombre de coups durs. On se serre les coudes et on priorise. Ça renforce les liens.
Ils ont grandement participé à mon éducation (« le couteau à droite » ; « si tu veux y arriver dans la vie, il faut travailler » ; « il faut boire un verre de rouge par jour, c’est le cardiologue qui le dit… »), mais aussi à panser mes blessures, fêter mes victoires, mes succès. Ils m’ont toujours soutenu envers et contre tout. Je passais d’abord. Ils représentent pour moi, le réel sens du mot famille, c’est-à-dire, ce sentiment d’amour inconditionnel que rien ne pourra ébranler. Je peux leur dire ce que je pense, être celle que je suis vraiment, ça ira. Ils ne seront peut-être pas d’accord, mais je sais qu’ils m’aimeront quand même, toujours, à jamais.
– Je précise, que j’attribue le sens réel du mot famille à plusieurs personnes de mon entourage (j’entends déjà mes parents crier à l’injustice!) –
Avec mon grand-père j’ai développé le cran au-dessus de complicité. C’est à dire qu’il est le premier de la famille à savoir quand j’ai un mec et quand je me fais larguer aussi. Une fois je suis sortie avec un mec de Limoges, et quand je me suis faite larguer il m’a dit « Ah tu t’es faite limoger ». Drôle, on se marre, ah-ah. Bref vous avez cerné le personnage qu’est cet ancien chef d’entreprise à la retraite…
Ma grand-mère est donc à l’hôpital comme je vous disais et nous sommes tous très inquiets évidemment. Mais nous sommes là les uns pour les autres. Parce que c’est la famille et on s’aime.
L’autre jour j’ai donc appelé mon grand-père adoré, après une journée de boulot difficile, un torticolis persistant et inquiète pour ma grand-mère et pour lui.
Il m’a confié être fatigué et préoccupé mais a trouvé suffisamment d’insolence et d’humour en lui pour me dire : « Ben voilà, tu vois quand on te dit qu’il est temps que tu fasses des enfants si tu veux qu’on les voit ». Et ça l’a fait marrer. Et moi aussi.
Je n’ai pas sorti ma carte féministe pour lui expliquer à quel point son propos était déplacé parce que dans sa bouche c’était drôle et plein de tendresse et que je sais profondément que, oui il aimerait avoir des arrières petits-enfants, mais il respecte plus que tout mes choix de vie. Même s’il n’est jamais d’accord. Parce que c’est ça l’amour inconditionnel.
Et parce que c’était drôle. Et que cela me permet de prouver, que oui on peut rire de tout.
« Oui, on peut rire de tout. On doit rire de tout. De la guerre, de la misère et même de la mort. Au reste est-ce qu’elle se gêne la mort, elle, pour se rire de nous ? » Pierre Desproges.