« Nous arrivons en gare de Montpellier Saint Roch, Montpeliier Saint-Roch, 3 minutes d’arrêt ! ».
Je me lève du siège 66 de la voiture 7, je salue le petit garçon à lunettes et son père qui voyagent en face de moi « Bon voyage ! » #grandsourire.
Je mets mon sac à main en bandoulière, et prends mon ordinateur et mon bouquin à la main. Il me reste largement le temps de prendre ma valise, descendre à l’étage en dessous et sortir avant que le train ne reparte en direction de Narbonne.
J’entame les quatre pas qui me séparent de ma valise… et là… c’est le drame, ma valise n’est plus à son emplacement. A la place, un espace vide. Où est donc passée ma petite valise noire ‘cabine’ qui voyage avec moi depuis quatre ans et qui renferme tout mon nécessaire pour un weekend Montpelliérain ?
Je regarde partout, j’envisage toutes les solutions lorsque j’aperçois juste au-dessus du compartiment qui abritait ma valise : une autre valise noire cabine, l’espace d’un instant, mon cœur retrouve son rythme et un sentiment de soulagement m’empare.
Après consultation rapide de ladite valise, je m’aperçois qu’un système de code est nécessaire pour l’ouvrir… Ce n’est pas ma valise, mais ma ressemblance et la coïncidence font « tilt » dans ma tête… QUEL EST L’IDIOT QUI S’EST TROMPÉ DE VALISE ???? L’ascenseur émotionnel.
Je pars malgré tout dans une course contre la montre à la recherche de ma valise lorsque mes compagnons de voyage m’annoncent que les contrôleurs ont bougé des valises. Nous entrons en gare lorsque je suis encore en train de parcourir les autres wagons.
Je marche vite, je me faufile entre les gens qui se tiennent prêts à descendre, j’ai chaud, je transpire, la porte du wagon se renferme sur moi, j’ai mal. J’enjambe une poussette contenant un humain miniature qui me regarde comme si j’étais une folle.
« Pardon, excusez-moi, pardooooon » j’essaie de rester polie et calme alors que l’envie d’hurler « POUSSEZ-VOUUUUUS » me gagne. Je suis peut-être vraiment folle ?
On arrive en gare de Montpellier, il est temps de me diriger vers la sortie, je rejoins l’étage inférieur et me retrouve au milieu des gens qui attendent sagement que la porte s’ouvre. Ils sont calmes et silencieux, je suis en sueur, rouge comme une tomate et en panique. Pourquoi ne paniquent-ils pas avec moi?! Ce calme est insupportable. Je m’entends dire à voix haute « mais quel putain de connard imbécile ! ». La rage a définitivement atteint mon cerveau et s’est transformée en folie.
L’homme doit venir me chercher à la gare, j’essaie de l’appeler mainte fois… Pour lui dire quoi ? « Arrête le train, arrête les contrôleurs, appelle le Président, contacte le GIGN, arrête le monde : on m’a volé ma robe à pois ! ». Ridicule.
Mon téléphone décide à ce moment-là de ne plus fonctionner correctement, je manque de faire tomber mon ordinateur et mon livre tandis que j’essaie de déverrouiller ce foutu téléphone. L’homme ne répond pas, 8ème tentative, il me rappelle : « on m’a volé ma valise…. ». Il n’y a rien d’autre à dire.
Je descends du train, je me retrouve sur le quai « à poil » et pars dans le sens inverse de la gare, je croise donc tous les passagers du train 6218 en direction de Narbonne, tandis que je suis toujours au téléphone en train d’exprimer ma rage.
« Je pars à ta rencontre me dit l’homme. » Après 5 min et arrivée en voiture 15, je réalise que je ne suis pas du tout au bon endroit ! La folie, c’est quand même quelque chose.
Je rejoins l’homme, on se dirige vers des contrôleurs pour leur raconter mes déboires. Je me calme, apparence oblige. « Faites une déclaration en ligne ». Déclaration mon c** !
J’accepte mon sort… je regarde l’homme et lui dit « je n’ai même pas de culotte ». On rit. Je n’ai vraiment pas de bol.
Bref on m’a volé ma valise.
Fort heureusement elle ne renfermait aucun objet de valeur – mise à part ma brosse à dent électrique – ni de valeur sentimentale. Le plus grave aurait été qu’elle contienne mon ordinateur, il n’y est resté que son chargeur. Quelques robes, une veste en jean, un lisseur, du maquillage, un maillot de bain et une paire de tennis léopard d’aucune réelle valeur. Un petit billet quand même lorsqu’on fait un rapide calcul, mais ce n’est rien, que du matériel.
Enfin pas tout à fait. Elle renfermait mes robes d’été préférées. Des bouts de chiffons ? Peut-être. Mais non, en réalité non. Parce que les choix vestimentaires que l’on décide de mettre dans une valise pour un weekend dans sa belle-famille ne sont pas les mêmes que pour d’autres occasions.
On prend des vêtements dans lesquels on se sent nous-mêmes, invincibles, belles dans lesquels nous sommes à l’aise afin que nous n’ayons pas à nous soucier de rentrer notre ventre toute la soirée ou cacher ce bras – que nous ne saurions voir – tout en tentant de faire bonne impression… En témoigneront mes nouvelles cousines, après trois mojitos, tu ne fais de toute façon plus « bonne impression ». Tu fais, tout court.
Parce que parfois ce n’est pas juste une fringue, c’est une extension de nous-même qui dit au monde, voilà qui je suis.
Je suis cette robe à fleur qui souligne la taille et me fait supporter les 34 degrés du sud de la France sans me sentir comme une truie en sueur aux mollets enflés. Je suis cette robe à pois qui ne montre pas mes formes et dans laquelle je peux évoluer sans me soucier de mon apparence. Je suis cette paire de tennis cool mais coquette, je suis ce jean mom qui me fait de jolies fesses (toutes celles qui portent ce style de jean savent… !) et dans lequel j’assume mon petit bidon tant je me trouve stylée quand je le porte… Ce ne sont pas juste des fringues.
Bref, on m’a enlevé une petite partie de moi-même.