Peut-on séparer l’Homme de l’artiste ? Vaste question. Peut-être pas aussi vaste que l’éternel débat chocolatine – pain au chocolat, mais tout de même : c’est une question qui taraude régulièrement les esprits.
Et pour cause, cette question restera probablement sans réponse tant que les Hommes auront du talent et tant que nous placerons ce talent au-dessus de la justice. La justice, qui soit dit en passant a brillé par son absence lors de cette 45e Cérémonie des César. Pas autant que l’absence de Polanski, mais presque.
Alors il y a ceux qui pensent qu’un bon film, un joli tableau, ou toute œuvre d’art peu importe l’apparence qu’elle prend, excuse l’attitude de l’homme ou du moins en est décorrélée. Que l’artiste a le droit d’exister malgré l’Homme. Après tout, pourquoi pas. Il serait quand même dommage de se priver d’une bonne croûte, d’une belle photographie, ou d’un film historique seulement parce que la personne derrière le pinceau ou l’appareil est accusé d’un crime ou d’un délit.
Et puis après tout, il n’est peut-être même pas coupable et je dirais même plus : la loi et la morale évoluant aussi vite qu’un Pokemon sous amphétamines, il se peut qu’un jour, un enfant de 8 ans ait atteint sa majorité sexuelle sans le savoir. Après tout, le consentement -Robin Thickes ne nous contredira pas, est une ligne floue. Et puis l’art… que ferait ce monde sans l’art ?
C’est vrai que sans l’art, l’Homme ne serait plus rien. Alors peut-être serait-il plus facilement dénoncé et condamné ?
Parce qu’il y a les victimes. Grandes oubliées de tout ce cinoche. Celles qui luttent en silence, avec pour seuls alliés leur honte et leur traumatisme. Démunis de toute justice, elles regardent au travers d’un écran, l’Homme et son œuvre être acclamés, applaudis, se gaver de champagne et de caviar, pendant qu’elles, elles se gavent de souffrance.
Elles observent de loin. Impuissantes, apeurées, écœurées. Lorsqu’un jour, l’une d’entre elles prend la parole et se fend d’un « me too » courageux, s’en suit alors une déferlante de témoignages et par un ricochet incroyable les médias, puis la justice, saisissent enfin le sujet et les coupables.
C’est alors, que toutes celles qui étaient restées muettes derrière leurs écrans trouvent enfin le courage de parler. L’espoir d’une vie. Mais la loi n’a pas vocation à soulager les espoirs perdus. C’est alors que la justice leur répond tout simplement : il est trop tard.
Rien ne change finalement, tant que nos agresseurs ont du talent.
Gavez-vous de souffrance, c’est tout ce qu’il vous reste. Au diable la justice, retournez chez vous, allumez la télé et appréciez l’artiste et en silence s’il vous plait, au nom de l’œuvre.
Car, ce soir, mesdames et messieurs, le prix de la meilleure réalisation est attribué à…